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Comment susciter chez nos enfants l’envie d’apprendre ? Cette vaste question revient comme une éternelle rengaine. L’objectif est d’aider nos enfants à se construire grâce à l’enseignement scolaire en adoptant de nouvelles stratégies fondées sur l’expérience passée. Agnès Baumier-Klarsfeld, auteure de Réveiller le désir d’apprendre (Albin Michel) décrypte les solutions envisageables pour booster la soif de connaissances.

La motivation : une notion essentielle

La motivation de l’élève est proportionnelle au plaisir d’apprendre. La notion de plaisir est trop souvent niée au profit du résultat. Le succès est un but à atteindre mais il doit se cultiver. La motivation rentre en jeu, elle doit être présente à chaque instant comme une béquille quand l’élève doute de ses capacités. « Il faut féliciter un enfant pour ses efforts, sa persévérance, qui lui ont permis de progresser, pas pour son talent », explique l’auteur de . Aborder avec l’élève ses doutes et ses motivations est un bon moyen d’apprendre à connaître ses failles et ses aspirations. Les notes ne sont plus le seul impératif pour se motiver car le goût d’apprendre l’emporte sur le résultat. « Il faut toujours se centrer sur la manière dont l’enfant parvient peu à peu à maîtriser une tâche, sur la façon dont il pilote son apprentissage. »

La valorisation de l’effort est cruciale

La démarche d’entreprendre l’apprentissage comme une compétition envers soi-même pour acquérir de nouvelles facultés intellectuelles est une nouvelle source de motivation. L’encouragement conduit aussi à féliciter l’élève. Ce cercle vertueux produit d’excellents résultats : « Ce qui est important, c’est ce que tu réussis à apprendre. » Il faut alors valoriser l’effort accompli d’où l’apprentissage : apprendre avant tout de ses erreurs. Une critique constructive de l’enseignant suffit à majorer l’évolution de l’élève et à constater de réelles avancées. Valoriser, oui, mais pas assister l’élève et garder un regard objectif. « Mais veiller à ce que les élèves aient toujours confiance en leurs chances de succès nécessite aussi de les mettre en position de pouvoir objectivement réussir. »

Le cercle familial : un paramètre à ne pas négliger

Le facteur social a son importance dans l’apprentissage. L’entourage familial joue un rôle sur la transmission de l’enseignement. L’accompagnement de la part de la famille proche garantit l’équilibre de l’élève. Il ne faut pas confondre soutien moral et facteur d’exigence. C’est-à-dire, la famille se doit d’être bienveillante et non pas une pression supplémentaire. Les parents ne doivent pas se positionner en tant qu’inspecteurs des travaux finis. Ils doivent s’investir dans l’éducation de leurs enfants. Il faut bâtir une passerelle entre les institutions que représentent la famille et l’école, pour promouvoir un enseignement bilatéral qui participe à l’enrichissement personnel de l’enfant. « Intégrer l’enseignement scolaire dans l’univers familial et familier des jeunes semble aller de soi pour favoriser la réussite de tous. »

Échanger pour mieux apprendre

Les facteurs environnementaux influencent notre perception à l’heure d’apprendre. Le travail en collectif semble développer les capacités cognitives des élèves. L’interaction conduit les élèves à communiquer sur le savoir acquis et les rôles peuvent s’inverser, un élève devient « l’enseignant » d’un autre. Il retransmet la connaissance assimilée et doit effectuer un travail de reformulation qui lui permet de comprendre la logique qui l’a conduit à déchiffrer tel ou tel exercice. « Sans interactions, un individu ne peut apprendre correctement. C’est à partir de la confrontation avec autrui que s’affine le raisonnement. » L’entraide est bénéfique et développe l’esprit d’entreprise. « Beaucoup de managers ont entendu le message et cherchent à inspirer leurs troupes en traçant une voie, en donnant sens à l’action collective. Un grand dessein aide à fournir l’effort prosaïque demandé au quotidien. »

Toucher et être touché pour mieux apprendre

Le désir d’apprendre est intimement lié à la notion de plaisir. Redonner du plaisir à l’apprentissage passe par véhiculer une idée de bien-être propice au travail. « Un tel enseignement des émotions contribuerait à pacifier les cours de récréation. » (p.110) Accorder une place à l’artistique pour éveiller l’esprit des enfants sur ce qui les entoure. Le besoin d’incarner l’apprentissage, de le faire vivre pour qu’il puisse laisser une trace dans la mémoire des élèves. « Ce que nous ne sentons pas, nous l’oublions. » Films et autres jeux de rôle participent à créer un lien entre l’élève et la discipline enseignée. Apprendre mais surtout comprendre le message transmis. « Le plaisir de la compréhension est probablement l’émotion la plus forte que peut faire vivre un enseignant. » L’idée est de piquer la curiosité des jeunes.

L’estime de soi : la clé de la réussite ?

La pression engendrée par la société pousse nos enfants à avoir peur de l’échec. L’estime de soi est aussi un facteur de réussite. Lorsqu’on croit en soi, on ose plus, on tente plus et donc les probabilités de réussir sont plus grandes. Les jugements négatifs de la part des autres conduisent à un abandon de l’élève dès le premier échec. L’état de l’élève au moment d’apprendre conditionne sa perception de l’apprentissage : l’ambiance de classe joue sur la concentration des élèves. La peur de l’échec a un impact sur l’estime de soi. « Le rôle de l’école, c’est de nous aider à trouver notre énergie intérieure. Si l’on détruit leur estime d’eux-mêmes, si on ne leur donne pas droit à l’erreur, les enfants n’essaient plus d’apprendre, affirme Claire Blondel, prônant un virage radical de notre système vers une « éducation » plus positive à même d’encourager la prise de risque. »

L’importance du jeu pour développer la créativité

Les jeux vidéo ne sont pas si néfastes, ils aident à expérimenter, à apprendre de ses erreurs et servent d’exercice pour s’adapter à des situations complexes. Ils favorisent l’acquisition de méthodes et de stratégies pour débloquer des problématiques. Les jeux ont la capacité d’apprendre par l’action et éloignent la peur de l’échec et du jugement d’autrui. « S’immerger dans un monde inconnu, avec des missions à mener, des obstacles, des combats, des comparses et des ennemis, laisse beaucoup plus de souvenirs qu’une simple lecture de documents ! Les jeux motivent à se surpasser pour accéder à de nouvelles étapes. » Quand on joue, le fait de recommencer encore et encore n’est pas un problème. « Les jeux s’adaptent au rythme personnel de chaque élève et gagnent à être plus représentés dans l’enseignement scolaire. »

Les écrans numériques comme support d’apprentissage

Les écrans permettent une ouverture sur le monde au-delà des murs de sa classe : visioconférences, cours en ligne, etc., suscitent le désir d’apprendre. La multitude des services en ligne attise la curiosité et le désir d›apprendre des élèves. « Le principal apport des écrans est d’ouvrir les classes sur l’extérieur. » Un nouveau champ des possibles s’ouvre à eux avec l’immersion dans un monde professionnalisant : la prise de contact avec des professionnels est possible et des stages virtuels sont à portée de mains pour approfondir ses acquis. L’outil informatique permet de créer en mettant à profit ses connaissances sans pour autant avoir l’impression de travailler. On crée alors son propre projet personnel. Mettre la technologie au service de l’élève mais aussi de l’enseignant. Par le biais de l’informatique, l’enseignant peut récolter des informations pour évaluer le temps passé sur chaque exercice, les points à améliorer, et adapter sa manière d’enseigner en fonction.

Étudier d’autres langues pour améliorer son rapport à l’apprentissage

La France est multiculturelle par la richesse et la diversité de ses habitants. L’immigration a apporté en France l’ouverture sur différentes cultures mais il faut désormais intégrer ces autres langues au paysage français. « Reconnaître l’intérêt pour les enfants d’origine étrangère de parler à la maison la langue natale de leur famille serait déjà un premier pas. » Le bilinguisme est un atout à cultiver car plus on apprend jeune une langue plus on a de chances de la maîtriser. De même, l’apprentissage de la langue par ses propres moyens reste le meilleur moyen pour maîtriser une langue. Une immersion totale dans la langue permet de se familiariser à celle-ci. Les outils numériques jouent alors un rôle de substitution des précepteurs de langue d’autrefois et ouvrent l’esprit à assimiler d’autres langues.

Visualiser pour mieux comprendre

Donner du sens à ce que l’on apprend. La pratique reste primordiale pour rendre moins abstraite une notion. Les sciences doivent se pratiquer pour être pleinement perçues. L’expérimentation est nécessaire et doit être indissociable de la théorie. « Pas assez de place accordée en classe aux manipulations d’objets et aux modélisations visuelles. » S’approprier une attitude scientifique aide à concevoir l’enjeu de la démarche scientifique et à enrayer les lacunes des jeunes Français dans ce domaine. Le sens des sciences est lié à la pertinence et au côté ludique de l’apprentissage qui peut se faire par les jeux comme un système de détour pour ne pas brusquer l’élève. Une phase de découverte de l’élève sans nommer l’exercice (l’algèbre par exemple) mais en laissant à l’élève le soin de comprendre le raisonnement.

Ce livre à destination des parents jette un regard lucide sur l’enseignement scolaire français. L’enquête réalisée par l’auteur dépeint un système éducatif qui gagne à être réformé. Réveiller le désir d’apprendre (préface de Frédéric Taddéi) est disponible en librairie à partir du 28 août 2016.

Caroline Vazquez

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