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L’économie de la vie s’ouvre bien au-delà de nos trouilles gauloises

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Ce peuple pessimiste ne doit pas se tromper de liberté.

Olivier Magnan, rédacteur en chef

Nous sommes comme des détenus soudain remis en liberté conditionnelle.

Ou comme ces animaux rendus à leur milieu naturel qui reniflent à dix fois avant de franchir la grille de leur cage.

Et pareils à nous-mêmes, nous broyons du noir. Pas même séduits par ces « étrangers déconfinés » que les JT nous montrent à loisir, souriants, contents, certains aux terrasses des cafés que le « Plan » nous interdit. Râleurs : on se plaint d’incohérences, de manques, de directives floues. On nous dit que notre liberté conditionnelle mesure 100 kilomètres, mais 100 kilomètres, quoi ? Au compteur de la voiture ou à vol d’oiseau ? À vol d’oiseau dit le Premier ministre. Ah mais alors, comment ça se traduit en kilomètres au sol ? Et tout à vau-l’eau. Mais qu’allons-nous faire, patauds que nous sommes, de notre régime de semi-liberté ? Un sondage Ifop-Judicial pour Le Journal du Dimanche et Sud Radio entrevoit nos souhaits de pessimistes. Car nous le sommes plus que jamais : 71 % ! Nous sommes grognons : 34 % seulement estiment que nos dirigeants sont « de qualité ». Un/e Français/e sur deux pense le pays en mesure de se réformer (nous étions 70 % à l’affirmer vraiment en 2010). Et 66 % glissent sur la pente décliniste…

Guère étonnant si 65 % redoutent le retour à l’école – le cluster du collège de Vienne ne les rassurera pas ! Si 62 % regardent les transports en commun comme un nid dangereux. Si 55 % disent renoncer à leurs vacances.

Côté positif, pourtant, parce que nous ne sommes pas à une contradiction près, nous voilà 83 % à croire en la France et au « monde d’après ». On veut :

Et comme nous ne comprenons pas toujours les sous-titres des films en VO, nous tenons pour moins prioritaire l’environnement (45 % seulement en jugent autrement), ce qui a de quoi inquiéter au moment où les spécialistes attribuent à la pollution et à la chute de la biodiversité l’origine de la pandémie.

Jacques Attali, écrivain, analyste

Le désormais « vieux sage » que demeure Jacques Attali voit ses craintes se confirmer : « Nous n’avons pas mis l’accent sur l’économie de la vie » dans laquelle il range la santé, l’hygiène, l’éducation, la recherche, l’eau, l’énergie propre, la limitation des déchets, le numérique, la démocratie, la création artistique, la sécurité sous toutes ses formes. Il dit que nous devrons leur consacrer 90 % du PIB dans une économie de guerre. En face, il faudra, plaide le président de Positive Planet, freiner sur l’automobile, l’aviation, l’armement. Le tout, bien sûr, sur fond de solidarité européenne et de sauvegarde de toute l’Afrique (dans notre intérêt).

Mais pour y parvenir, il va peut-être falloir arrêter de limiter le déconfinement à mesurer le mètre qui nous sépare du client de devant et de derrière. L’épidémie est derrière nous. La porte qui s’ouvre n’est pas celle d’une prison sur le monde d’avant. C’est une nouvelle issue sur un autre monde, à recréer.

Olivier Magnan, rédacteur en chef

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