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L’âge des premiers amis : une étape cruciale de socialisation

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Les premières années de la vie sont celles de l’apprentissage des codes et des outils indispensables au parcours social et au développement de l’enfant. La docteure Élisabeth Ouss-Ryngaert, pédopsychiatre à l’hôpital Necker Enfants malades et présidente de l’Association européenne de psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent France, décrypte les enjeux de cette étape cruciale pour la construction de l’enfant.

En quoi les premières étapes de socialisation sont-elles déterminantes ?

Nous sommes essentiellement des êtres sociaux. La socialisation détermine notre rapport au monde. Entre 0 et 3 ans, l’enfant développe ses compétences interactives, des liens d’attachement, de la reconnaissance de l’autre. C’est fondamental. Si l’enfant n’est pas socialisé dans les premières années de sa vie, c’est difficile d’acquérir ces compétences ultérieurement. La socialisation entre 3 et 6 ans, l’âge préscolaire où l’enfant a déjà développé son langage et est outillé pour l’interaction sociale, est également déterminante. C’est là que l’enfant va beaucoup apprendre par imitation avec ses pairs et développer un répertoire d’interactions. L’enfant va s’adapter à ces interactions et s’outiller, se donner comme un jeu de cartes entre ses mains pour faire face aux interactions sociales.

Les parents doivent-ils faire en sorte de stimuler ou provoquer cette socialisation ?

L’enfant va spontanément vers les autres, s’il n’y va pas, c’est qu’il éprouve des difficultés. La mode actuelle d’avoir une stimulation très importante dès le plus jeune âge est un peu volontariste et risque de mener à des surstimulations. On sait que l’enfant a besoin de situations sociales suffisantes, mais pas excessives. Le « gaver » n’est pas optimal pour son développement. L’enfant doit faire lui-même ses expériences sans qu’on lui mâche le travail, quitte à parfois connaître des échecs. Chez un bambin qui va bien, il n’y a pas de stimulations particulières à lui donner. En revanche, pour les enfants en difficulté psychologique ou développementale, il est important d’être attentif et de les placer en situation optimale.

Quelles sont les complications possibles ?

Par exemple, l’omniprésence des écrans diminue les interactions sociales et ne fait pas du bien aux enfants déjà en difficulté car ils limitent leurs interactions. Durant cette crise sanitaire, on remarque notamment des jeunes qui accusent un retard de langage car ils ou elles ne sont pas assez exposé·es à leurs pairs et ne développent pas bien leurs compétences. L’école maternelle obligatoire repère très tôt les difficultés éventuelles. C’est très important pour la prévention de la santé mentale de l’enfant et le moyen rapide de lui proposer des aménagements adaptés. Plus on repère des difficultés tôt, mieux c’est.

Quel est le plus important à retenir ?

Il faut que les parents se fassent confiance à eux-mêmes et à leurs enfants. Les règles de bon sens sont les meilleures. Tout ce qui relève de la créativité du parent et de l’enfant est très important. C’est ce qui aide le plus au développement et à la singularité de chaque petit. La multiplicité des conseils complexifie les choses. Le plaisir, l’improvisation, la créativité avec son enfant et la confiance en soi-même sont les meilleurs atouts pour qu’un enfant grandisse bien. Les conseils, il faut les écouter mais il ne faut pas les appliquer à la lettre ou de manière studieuse. l

Adam Belghiti Alaoui

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