StopCovid validée en dernière minute

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L’application de traçage numérique, qui continue à poser question, a été approuvée par les députés et les sénateurs le 27 mai.

C’est ce qui s’appelle un atterrissage mouvementé. Annoncée début avril par le gouvernement, l’application StopCovid doit entrer en service dès lundi 2 juin, phase 2 du déconfinement. Après l’approbation par les députés mercredi 27 mai, en dernière minute, le Sénat a lui aussi donné son accord le soir même. L’application de traçage des contacts, en attendant sa mise en disponibilité dans les magasins d’applications d’Apple et d’Android, est d’ores et déjà passée entre les mains des militaires, utilisés pour l’occasion comme bêtatesteurs.

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Cette application a vocation à optimiser la prise en charge d’une éventuelle nouvelle pandémie à venir. L’utilisateur qui se découvre contaminé au coronavirus va automatiquement et en tout anonymat prévenir les autres utilisateurs de l’appli croisés dans les quinze jours précédents, afin qu’ils.elle prennent les dispositions adéquates : confinement personnel, dépistage, gestes barrières, etc. StopCovid, développée sous la direction de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique – Inria – avec le concours d’Orange, de Dassault Systèmes ou encore de Capgemini, mais sans l’aide de Google ni d’Apple qui ont développé leur propre plate-forme, dote les smartphones d’identifiants cryptés. C’est la technologie de connexion sans fil bluetooth qui est à l’œuvre. Chaque smartphone garde en mémoire les identifiants des appareils croisés à moins d’un mètre et pendant plus de quinze minutes. L’utilisateur qui se découvre contaminé communique au système central la liste des identifiants cryptés croisés sur la période via un code donné par le médecin qui a posé le diagnostic. Une alerte s’affiche sur le téléphone de l’utilisateur dont les identifiants figurent sur cette liste. Cette architecture centralisée diffère de la plate-forme développée par Apple et Google. Là, la personne contaminée n’envoie pas au serveur central les identifiants cryptés des personnes croisées mais son propre identifiant crypté.

Quid des principaux contaminés, les seniors ?
L’entrée en service de l’application pose tout de même quelques questions. Son bon fonctionnement technique, avant tout, demeure une condition sine qua non à sa pertinence. Or le développement par les entreprises françaises sans soutien des géants américains semble avoir compliqué la tâche des développeurs. Ensuite, StopCovid implique que la population soit massivement équipée de smartphones et qu’elle soit librement téléchargée : en 2019, le Credoc indiquait que 77 % des Français.es en étaient équipé.es. Parmi les non équipés, les personnes âgées, plus fragiles face à l’épidémie de covid-19, occupent une place de choix, ce qui ne garantit pas un fonctionnement optimal.

Il faudrait que tous les smartphones possèdent l’appli : impossible
Et puis l’application, par sa nature même, pose la question délicate de la vie privée. Certains experts du numérique ou juristes y voient le premier caillou de l’ère de la surveillance généralisée dans laquelle la population est susceptible d’être inondée d’instructions à suivre par des algorithmes qui savent tout sur tout le monde. Le gouvernement, évidemment, assure que tout a été mis en place pour garantir que les données ne soient exploitées ni par lui ni par quelque autre acteur malveillant. La validation le 26 mai par la Cnil – informatique et libertés –, qui estime que StopCovid ne contrevient pas aux dispositions législatives en vigueur, va dans ce sens. « L’application ne conduira pas à créer une liste des personnes contaminées, mais seulement une liste de contacts, pour lesquels toutes les données seront pseudonymisées », assure la Cnil. Lire l’éditorial d’Olivier Magnan du 27 mai.

Enfin, une incertitude sur le bénéfice de l’application plane toujours : sur la seule base du volontariat, pourra-t-elle jouer le rôle qu’on attend d’elle ? Avec un taux d’équipement de 77 % et un maillage minimum de 70 % de téléchargements pour produire l’effet de masse désiré, on est loin du compte. L’exemple de l’application mise en place à Singapour s’est avéré un échec. Mais pour le gouvernement, en dépit de tous les doutes, le jeu en vaut la chandelle et le potentiel de StopCovid, capable de casser les chaînes de contamination qui ne seraient pas décelées sans elle, suffit à lui donner sa place. Place au doute.

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