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La circulation après le 11 mai dans la limite de 100 km sera la même, quelle que soit la « couleur ».
La France tricolore à l’image d’un feu de circulation : vert, orange ou rouge. On ne peut plus familier. Mais au fond, rien de bien méchant non plus : la circulation, au-delà du 11 mai, ne sera guère plus entravée à partir d’un département « rouge ». Dans les deux cas, sauf justification impérieuse, la limite sera de 100 kilomètres sans justificatif. Détail.
Désigner les départements par le rouge a suscité des réactions, comme si la géographie se colorait soudain d’un sceau d’infamie. En témoignaient lors la première publication le Lot, le Cher ou encore la Haute-Corse – stigmatiser des Corses ! –, peu touchés mais rougis. En cause a priori, une affaire de cartes (lire infra).
Cette carte à haut degré de susceptibilité ne désigne pourtant pas des départements confinés aux côtés d’autres où le déconfinement serait total. Elle est en outre amenée à changer tous les jours et doit rester ce pour quoi elle a été conçue, comme l’a rappelé le Premier ministre : « Elle guidera chaque département dans la préparation du 11 mai », date de la sortie progressive du confinement. Avant cette date, l’orange passera au vert ou au rouge. Il n’empêche que ce choix de couleurs est des plus maladroit : à entendre l’homme ou la femme de la rue, on croit que le rouge “punit” et que le “vert” libère. Il n’en est rien. Mieux aurait valu un choix de couleurs « neutres » ou de lettres : A-B-C.
Comment la carte fut-elle dressée ?
Olivier Véran, ministre de la Santé, l’a expliqué assez clairement, à partir des données officielles consultables par tout un chacun. La première carte colorie les départements en fonction de la part des passages aux urgences des malades suspectés de covid, confirmés ou non. Au-dessus de 10 %, un département est rouge. Une deuxième carte classe les régions et les départements qui y entrent par le pourcentage des lits en réanimation (avant l’épidémie) occupés par des malades (plus de 100 % si des lits ont été créés). Une troisième carte additionne ces deux critères : rouge + rouge = rouge, rouge + vert = orange. D’où le rouge des départements litigieux : on n’a tenu compte que des données de la première carte, et pour cause : entre le 23 et le 29 avril, plus de 10 % des passages aux urgences dans ces trois départements concernaient des suspicions de covid-19.
Disparité des chiffres
Corse du Sud, en vert, Haute-Corse en rouge alors que le premier département dénombre cinq fois plus de décès à l’hôpital depuis le début de la pandémie, on comprend que les autorités locales aient réagi. Simplement, il faut comprendre que la situation est analysée au jour où les cartes sont diffusées. Or le ministre Véran veut cartographier « la circulation active du virus » et non la globalité de la situation depuis le début de l’épidémie.
D’où le vert pour le Bas-Rhin et le Haut-Rhin sur la première carte et le rouge sur la deuxième. Le vert pour ces deux départements passablement touchés au début de l’épidémie traduit que « sur les sept derniers jours, l’activité épidémique de la covid y est considérée comme maîtrisée ». Le lot, au contraire, enregistre un taux important de passages aux urgences liés au virus : il passe au rouge alors qu’il n’a connu « que » 16 morts. Le jeu des couleurs risque de changer au jour le jour.
Une collecte des données aux calculs variables selon les hôpitaux
Tous les hôpitaux ne calculent pas de la même façon. Le « codage » de Bastia explique une surestimation des passages aux urgences. La correction est en cours. Idem pour le Lot. Et le Cher. Si vous ajoutez à ce jonglage de statistiques la prise en compte de données régionales et pas départementales parce que tous les établissements d’une région sont impactés par des malades « départementaux », vous finirez par ne plus tellement prendre en compte les couleurs.
Confinement relativement peu durci dans le « rouge »
D’autant plus qu’entre un département au rouge et un autre au vert, a fortiori à l’orange, la circulation ne sera pas tellement concernée : c’est surtout la réouverture des collèges et des parcs et jardins qui sera retardée dans le premier cas. Imaginer les habitants de l’Oise « enfermés » dans les frontières de leur département « rouge » après le 11 mai est tout simplement erroné.