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La pédagogie Montessori a le vent en poupe. Mais il n’existe aujourd’hui qu’une poignée de collèges et un seul lycée en France qui se revendiquent de cette pédagogie active. Se pose donc naturellement la question de la transition d’une école dite Montessori vers
le système traditionnel à savoir le collège « normal ».
Apprendre à apprendre
Alternative au système traditionnel, elle permet de cultiver une approche pleine d’atouts pour votre enfant. Celle d’apprendre à apprendre et de s’adapter à son environnement tout en développant son autonomie. Comme l’écrivait Maria Montessori : « N’élevons pas nos enfants pour le monde d’aujourd’hui, ce monde n’existera plus lorsqu’ils seront grands. Et rien ne permet de savoir quel monde sera le leur : alors, apprenons-leur à s’adapter. » En quelques mots, la méthode éponyme du docteur Montessori est une réflexion éducative qui trouve ses racines dans les essais cliniques et pédagogiques de cette dernière. L’Épiphanie scientifique fut de constater que l’adaptation du matériel pédagogique à des enfants attardés leur avait permis de nettement s’améliorer.
Dit autrement, l’intérêt d’une école estampillée Montessori est d’apporter à l’enfant un environnement favorable, qu’il s’agisse de la classe, de l’enseignant ou de ses pairs, adapté à ses besoins fondamentaux, dans le but de lui donner le goût de persévérer et de mettre du sens aux apprentissages pour pouvoir mieux se les approprier (voir encadré). En ce sens, il n’y a pas de crainte à cultiver concernant le passage de votre enfant vers une structure plus traditionnelle, ce dernier ayant cultivé des savoir être qui lui permettront de s’adapter à son nouvel environnement.
Qu’attend-on vraiment dans un collège en 2018 ?
Généralement, il est demandé aux enfants entrant au collège d’avoir développé des compétences qui lui permettent de gérer son temps et son espace. En d’autres termes, votre enfant doit être capable de lire un emploi du temps ou si vous préférez un tableau à double entrée. Il doit aussi être ponctuel et gérer les intercours pour se rendre à chaque cours qui rythme la journée. Ajoutez à cela des compétences en lecture et en mathématiques. Et les enseignants vont aussi demander aux enfants de plus en plus d’autonomie pour préparer leur cartable en fonction des cours de la journée… et surtout pour faire leurs devoirs ! Sur l’ensemble de ces sujets, un enfant qui sort d’une école Montessori n’a rien à craindre. Car ce métier d’élève ou plutôt ce métier de collégien est également nouveau pour chaque enfant du primaire en France.
Trop d’autonomie versus vie réglementée à la minute au collège
Une première difficulté cependant pointe quand nous nous penchons un peu plus sur les aspects pratiques de la méthode Montessori. Par exemple, dans une classe auréolée de cette nouvelle pédagogie, l’élève se déplace selon son bon vouloir et se place librement dans la classe avec le souci de ne pas déranger le climat de cette dernière. Autre différence, celle du rythme. Car la pédagogie Montessori s’adapte au rythme de l’enfant, à ses besoins voire à ses envies d’apprentissages. Cela se décline y compris sur les temps de pause. Il est coutumier de n’imposer que les pauses méridiennes dans les écoles Montessori. L’élève fait une pause quand il en ressent le besoin. Un travail préparatoire est donc à envisager pour que votre enfant s’engage sereinement au collège malgré de nouvelles mœurs. Le rôle des parents est alors de faire comprendre à l’enfant que cette façon de fonctionner est la plus communément développée pour maintenir du vivre ensemble dans des collèges qui n’ont pas la chance d’être en effectifs réduits comme tel est le cas dans les classes d’une école Montessori.
Construire des sociabilités extérieures à Montessori pendant
sa scolarité pour ne pas couper votre enfant du monde.
Des enfants sans programme, un problème pour le collège ?
Il importe de ne pas confondre socle commun et programmes scolaires. Une des grandes préoccupations des parents est de suivre le programme. Ce qui s’entend peut-être l’année de terminale. Mais rappelons que les connaissances et compétences sont définies par le socle commun des connaissances et compétences lui-même, défini à l’échelle européenne et qui prévoit trois évaluations entre six ans et 16 ans (jusqu’au brevet des collèges). Ce socle est obligatoire pour chaque institution qui enseigne sur notre territoire, qu’il s’agisse d’une école publique privée sous contrat ou privée hors contrat. Dit autrement, les écoles Montessori suivent les directives de l’Éducation nationale en termes de compétences, de connaissances et de savoir être sans pour autant s’appesantir sur des programmes trop souvent discutés.
De l’auto-évaluation à la notation, le pont à ne pas rater ?
Dans une école Montessori, il n’y a pas de note, ni de bulletins, encore moins de conseils de classe trimestriels ! Dans les écoles primaires classiques non plus. Mais il existe des évaluations que l’on qualifie de sommatives. Un contrôle si vous préférez. Comment un enfant qui sort de Montessori va-t-il s’adapter aux « interros » prévues comme surprises, DS, DM au collège ?
La réponse est dans votre propension à assurer une transition qui commence généralement dès les six ans en école Montessori. Pour ne pas faire des enfants Montessori des personnes hermétiques à tout autre type d’enseignement, ces derniers se familiarisent avec des livres scolaires plus classiques. Les exercices étant souvent une phase de consolidation des connaissances, ou le préambule aux évaluations, il ne reste aux enseignants et aux parents qu’à faire comprendre qu’un contrôle sera possible après ce type d’exercice. Rappelons également que l’éducation Montessori vise à permettre à l’enfant d’analyser ses erreurs et à les surmonter. Il devra cependant au collège affronter la rivalité, le dénigrement et le jugement de ses pairs…
S’habituer aux notes au collège peut paraître dérisoire. Si un élève qui vient de Montessori obtient un 5/20 ou un 12/20, il y a fort à parier que ce dernier souhaitera d’abord comprendre pourquoi il n’a pas rempli correctement les critères d’évaluation plutôt que de se concentrer sur la note en tant que telle. Et surtout, rappelons-nous qu’une note ne signifie pas grand-chose au collège : entre une faute d’inattention qui peut aboutir à un hors-sujet et à une note catastrophique, en passant par les notes inférieures à 13/20, qui, pour le collège évoquent un manque de maîtrise sur le sujet du contrôle… les notes au collège ne sont pas à envisager comme un fameux 10 au bac, sésame vers le supérieur. Car encore une fois il est question de socle commun de connaissances et de compétences validé au niveau européen. Avoir 10 signifie-t-il en avoir la maîtrise ?
Et le vrai monde dans tout ça ?
Nombre d’articles évoquent les classes Montessori comme des couveuses qui protègent du monde extérieur, des lieux tel l’abbaye de Thélème dans le Gargantua de Rabelais, un endroit presque utopique où règne un climat qui permet à tous de s’épanouir intellectuellement. L’arrivée au collège peut être ainsi rude. Parce que l’enfant est parfois cruel et ne réalise pas encore pleinement la portée de ses actes… Pour savoir rentrer dans un système plus « normal », il importe de nourrir des sociabilités extérieures à l’école Montessori. Une pratique sportive, ludique ou artistique semble ici tout indiquée.
Geoffroy Framery