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La communauté éducative s’est mobilisée rapidement pour assurer la continuité pédagogique et relever le défi de l’enseignement à distance. Elle n’en montre pas moins un certain nombre d’inquiétudes.

La situation était pour le moins inédite, tant pour les élèves et leurs parents que pour leurs professeurs et instituteurs. Certes, l’annonce du confinement, à la mi-mars, a considérablement bousculé les habitudes et les organisations. Mais elle a permis, au passage, de révéler la formidable réactivité de la communauté éducative, mobilisée dans un temps record pour assurer la continuité pédagogique auprès des élèves, notamment grâce aux outils numériques. « Le défi de l’enseignement à distance dans un contexte aussi inédit a pour le moins été pleinement relevé par les enseignants », assure Florence Rizzo, fondatrice et directrice de SynLab, association dédiée à l’accompagnement des enseignants. Les chefs d’établissements, eux aussi, ont montré leur satisfaction : selon une enquête menée par SynLab, la moitié d’entre eux se sont dits sereins et se sont félicités des liens de solidarité mis en place pendant la crise. Du côté des familles, la satisfaction est également de mise puisque 60 % d’entre elles ont exprimé leur contentement devant les propositions formulées par les enseignants. Il faut dire que téléphones et messageries électroniques ont été largement utilisés par les enseignants pour mettre en place des liens avec les familles, d’abord pour communiquer une organisation aux parents, puis pour assurer le suivi régulier de l’enseignement.

Liens ? Pas toujours

Pour autant, tout n’est pas si simple. Derrière ce bilan apparemment positif se cachent quelques craintes exprimées directement par la communauté éducative. Dans son enquête, menée auprès de 1 300 enseignants de primaire (40 %), de collège (24 %), de maternelle (15 %) et de lycée, SynLab pointe du doigt la grande inquiétude qui règne chez les enseignants. En cause, essentiellement : un manque de connexion ou de matériel. Jusqu’à rendre impossible l’établissement de liens étroits avec certaines familles. Pas moins de 17 % des enseignants ont été confrontés à cette réalité depuis la mi-mars. Dans les lycées, 40 % des professeurs ont été dans l’incapacité de contacter certains de leurs élèves par quelque moyen que ce soit. Plus à la marge, 6 % des enseignants ont indiqué ne pas disposer eux-mêmes de matériel adapté pour travailler à domicile.
Bien sûr, la mise en place d’outils adaptés à l’enseignement à distance a été rapide, mais sa viabilité dans le temps paraît largement incertaine : 70 % des enseignants se disent inquiets face à cette disposition, une proportion équivalente réclame un accompagnement pour mieux mener les activités pédagogiques à distance en parvenant à mobiliser plus efficacement les parents. Compte tenu d’un tel contexte, près de 70 % des enseignants craignent de perdre leurs élèves les plus fragiles. Pire : 42 % d’entre eux sont même persuadés que la continuité pédagogique est tout simplement inenvisageable avec certains élèves. Les raisons : l’insuffisance du soutien parental, notamment dans les petites classes, et les situations de décrochage, notamment au lycée. Finalement, seuls 20 % des enseignants montrent une certaine sérénité. « Si cette transition rapide a été vecteur d’innovation, elle est aussi une vraie source d’anxiété et même de risques pour les élèves les plus fragiles », analyse Florence Rizzo.

Solitude

Dans l’élan de leur quotidien, les enseignants se posent beaucoup de questions, qu’ils aimeraient se partager entre eux pour obtenir des éléments de réponse, et qui montrent que, derrière les apparences, ils demeurent relativement démunis dans cette situation d’enseignement à distance. Ces questions concernent la mobilisation des parents, la gestion du temps et de l’équilibre de vie, le type de travail à donner aux élèves en distanciel, le comportement à adopter vis-à-vis des élèves fragiles, la mise en place des outils à utiliser, l’évaluation de la progression et la notation, etc.
Face à ce constat, et pour prendre en compte la problématique liée aux élèves aux plus grands risques, SynLab formule un certain nombre de recommandations. En premier lieu, l’association insiste auprès des enseignants sur l’importance de tout faire pour garder un lien téléphonique. Parallèlement, elle préconise en mettre en place un tutorat individualisé, de communiquer avec les acteurs complémentaires de l’école pour coordonner les actions et de mettre rapidement à disposition des ressources et des modules de formation spécifiques à destination des enseignants. Enfin, elle demande la mise en place d’une cellule de coordination des acteurs de l’éducation scolaire et périscolaire pour mutualiser les efforts. Reste à voir ce qui sera mis en œuvre ou non dans l’hypothèse d’un prochain confinement.

Romain RIVIÈRE

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