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Il, elle, a piqué, subtilisé, emprunté, s’est approprié, bref, disons-le, volé, un jouet chez un copain, un peu d’argent dans votre porte-monnaie ou des bonbons dans un magasin ? Le/la gronder, le/la punir ? Si vous voulez qu’il/elle ne recommence plus, essayez de comprendre son geste et tenez face à lui/elle un discours clair.
Certes, le vol, pour les adultes, se nomme un délit. Les enfants, eux, ne sont pas forcément conscients de sa gravité, surtout avant 7-8 ans. Avant cet âge « de raison », « la notion de propriété – ce qui est à soi, à l’autre, à la collectivité – varie selon les individus. De même, les notions d’emprunt, de jeux en commun et de possession sont floues », explique le psychiatre et praticien dans le service de psychiatrie enfantine à l’hôpital de Cergy-Pontoise, Stéphane Clerget. L’enfant de cinq ou six ans explore le monde qui l’entoure. Parfois, s’il/elle vole un objet, c’est pour l’offrir à quelqu’un qu’il aime, pour lui faire plaisir. Au magasin, par exemple, il pourrait prendre un beau flacon de parfum pour maman ou encore un petit jouet pour un ami. Il pense que tout est à tout le monde et le vol n’est pas associé chez lui à quelque chose de mal. En grandissant, c’est souvent le désir immédiat de s’approprier l’objet pour le plaisir du jeu (si c’est un jouet) ou pour la puissance qu’il lui attribue (la bague brillante de maman à qui on fait tant de compliments) qui pousse un enfant à voler. « Il peut s’agir aussi d’un vol plus symbolique. Si un enfant considère qu’un autre est avantagé pour diverses raisons, il va s’approprier un objet à lui pour être un peu comme lui », affirme Stéphane Clerget. Mais il/elle vole aussi parfois pour faire comme les autres, prouver qu’il/elle est « cap » et se faire accepter dans une bande d’amis. Ce comportement s’accentue surtout à l’adolescence, avec des vols dans les magasins. La gravité des vols augmente avec l’âge.
L’enfant doit payer les conséquences de son acte
Les parents dont l’enfant a volé/vole doivent avant tout ne pas dramatiser la situation. « Il ne faut surtout pas le ou la traiter de voleur/euse au risque de le ou la pousser à s’identifier à un voleur plus tard. Il ne faut pas non plus l’humilier », prévient Stéphane Clerget. Bien sûr, il s’agit bien de mettre en lumière la gravité du vol. Si l’enfant a volé quelque chose dans un magasin, il convient de lui « expliquer comment fonctionne le commerce, le principe de l’échange d’argent contre un objet, le caractère illégal du vol – les enfants n’ont pas toujours en tête ces notions –, conseille le psy. Il faut lui dire que si un objet lui fait envie, il doit apprendre à s’en passer ou utiliser autre chose à la place ».
Pour que l’enfant réalise la gravité de son geste, il est important qu’il réponde de ses actes : qu’il/elle aille lui/elle-même restituer l’objet, là où il/elle l’a volé et présente aussi ses excuses à celui/celle qu’il a volé/e. Si les parents doivent payer l’objet dérobé, ils peuvent trouver un moyen pour que l’enfant paie sa « dette », par exemple demander qu’il assure des petites corvées à la maison (même si ce n’est pas son tour) ou amputer petit à petit la somme payée au commerçant sur son argent de poche. Le vol qu’il a commis doit se traduire par un coût réel pour lui.
Quand le vol a valeur d’un SOS…
Quant au vol intrafamilial, « il risque de cacher un problème affectif », évoque Stéphane Clerget. « Pour l’enfant, voler dans la famille, c’est vouloir s’approprier de l’amour », précise l’auteur de Soigner son enfant hyperactif sans médicaments (Fayard). Il arrive aussi que l’enfant incarne le symptôme d’une problématique familiale (secret de famille autour d’un vol, parent délinquant ou fraudeur, discours parental négatif sur les commerçants – c’est tous des voleurs… –, parents en difficulté financière que l’enfant veut aider, conflits d’argent entre parents)… En cas de vol régulier, il faut s’inquiéter vraiment. Ne pas hésiter à consulter un psychiatre comportementaliste pour enfant ou un psychologue pour enfant, car l’on est face au symptôme d’un malaise affectif. Le vol prend alors valeur d’un SOS. Une punition trop sévère risquerait de renforcer l’enfant dans sa conviction que ses parents ne l’aiment pas et le poussera à voler pour compenser ce manque ou attirer l’attention. Mais, indique Stéphane Clerget, « s’il s’agit d’un/e adolescent/e, même si la dimension affective reste présente, le vol pourrait aussi ressembler à une tentative de prise de pouvoir ou l’expression d’un conflit familial ».
Dans tous les cas, les parents doivent rester ouverts à la discussion et s’interroger sur le climat qui règne au sein de la famille. Par-dessus tout, ils doivent avoir à cœur d’entourer leur enfant d’attention, d’affection et surtout de lui consacrer du temps. Ne pas lui voler votre attention bienveillante.