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Il et/ou elle part voler de ses propres ailes
35 % des parents, disent les études, souffrent d’un fort sentiment d’abandon et de vide lorsque les enfants quittent le domicile familial pour les études supérieures ou un boulot. Les étudiant·es ont assuré leur dernière rentrée en octobre. Le psychiatre Stéphane Clerget connaît bien le syndrome du vide. Ses solutions astucieuses et pratiques pour y faire face.
En quoi le départ des enfants du domicile familial est-il une étape clé de la vie de parents ?
Les enfants occupent beaucoup la pensée et le temps des parents. À leur départ de la maison, pères et mères se retrouvent donc privé·e d’occupations liées aux rejetons, ce qui créé un sentiment de vide. Un vide qu’il faut désormais combler et surtout anticiper.
Il se passe un peu la même chose lors du départ à la retraite. On se retrouve face à l’ennui et surtout face à l’autre, car la place du couple devient plus importante. Et ainsi, le questionnement autour du couple se pose. Ce qui oblige à constater la nature des relations qu’on a dans son couple pour le meilleur ou pour le pire. C’est pour cette raison que le syndrome du nid vide va ou bien aboutir à des retrouvailles dans le couple et donc à une seconde lune de miel ou bien à une séparation quand on comprend qu’on ne peut plus vivre à deux et que, finalement, ce sont les enfants qui donnaient du sens à cette cohabitation.
Est-il vécu de la même façon par les deux parents ?
L’expression de la souffrance est majoritaire chez les femmes car elles ont le sentiment de s’être davantage investies dans l’éducation des enfants, en matière de temps et de préoccupation mentale. Cette douleur est aussi renforcée par l’âge qui correspond à peu près à la période du premier cycle de la ménopause. Elles souffrent alors de troubles d’humeur ou de prise de poids…
Les hommes ne vivent pas de changements physiques en ce sens. Pour eux, le départ des enfants sera difficilement vécu s’ils étaient beaucoup appliqués dans l’éducation des enfants. Le départ des enfants du foyer se révèle en outre douloureux pour les pères s’il est associé aux difficultés au travail.
Et quand on est parent célibataire ?
Par définition, un parent célibataire n’est pas confronté à la problématique du couple. Son souci est plutôt la solitude. Les enfants partis, il ou elle se retrouve vraiment tout·e seul·e à la maison. Dans un premier temps, il faut recréer des liens avec des amis, ceux qu’on ne voyait pas et ceux qui sont dans la même situation. Et pourquoi ne pas imaginer une fête pour le nid vide ? Si on a envie de revivre le couple, c’est d’ailleurs l’occasion pour le faire !
Et si on est vraiment déprimé, il ne faut pas hésiter à consulter un psychiatre.
Comment trouver le bon équilibre avec les enfants : à la fois proche mais pas trop, présent mais pas étouffant ?
En pensant à soi. Réinvestir des loisirs qu’on avait mis de côté, son couple.
Il y a des parents qui sont étouffants. Mais aussi ceux qui délaissent un peu leurs enfants. J’ai de jeunes patients qui se plaignent des parents qui vivent totalement leur vie. Certains enfants vivent mal cet abandon. Ils ont la volonté de s’émanciper mais, en même temps, ils ont envie que leurs parents s’occupent d’eux, qu’ils soient les gardiens de leur enfance.
Pour trouver le juste milieu, il faut garder en tête que bien que ce soient de jeunes adultes, ils ont encore besoin des parents. Il faut donc les laisser venir vers soi et une fois qu’ils viennent, se placer à leur disposition.
Concrètement, que faire pour passer le cap du syndrome du nid vide ?
Il se révèle parfois difficile de voir ses enfants partir, mais il faut se dire qu’un nid qui se vide va procurer un grand soulagement. Il faut voir des aspects positifs dans cette nouvelle vie. C’est tout d’abord une véritable liberté retrouvée. On a plus de temps, et du coup on en profite. On a des revenus suffisants pour des activités de loisirs ou des activités sportives qu’on a laissées de côté en devenant parent. On revit une nouvelle jeunesse.
Le départ des enfants laisse place aux nouveaux projets. Il faut profiter de ce coup de déprime pour prendre le temps de réfléchir, faire le point sur soi, se donner une vision presque existentialiste. Il est important de redéfinir la deuxième vie qu’on voudrait avoir : quelles sont les nouvelles priorités ? Est-ce qu’on garde le même lieu de vie ? Change-t-on de métier ?
Anna Guiborat